RuPaul, une institution américaine
Révélé dans les années 90 sur les scènes de la nuit new-yorkaise, RuPaul Andre Charles est devenu au fil de la décennie la "reine de Manhattan" et la drag queen la plus populaire des États-Unis. Porté par une personnalité flamboyante et très amicale, à l'opposé de l'image parfois froide et lointaine des personnages de scène des autres icônes de la discipline, RuPaul se révèle dans un premier temps par la musique.
En 1993, il sort un premier album résolument orienté disco, "Supermodel of the World", dont le single "Supermodel (You Better Work)" se hisse dans les cinquante meilleures ventes de singles, un exploit pour un artiste de la scène drag. Le morceau devient un incontournable des clubs à travers le pays, un hymne de la communauté gay, et un classique de la dance music des années 90 (Kurt Cobain, fan du morceau, deviendra même un de ses amis).
Chanteur, acteur, auteur et modèle à succès, il crée en 2009 "RuPaul's Drag Race", un concours télévisé destiné à mettre en lumière les nouvelles stars de la scène drag américaine comme Bianca del Rio ou Sasha Velour. L'émission devient un phénomène, notamment grâce à l'émergence des réseaux sociaux, et a connu depuis sa création de nombreux spin-offs et déclinaisons à travers le monde.
Un live de prestige
Devenir juré d'un soir dans "RuPaul's Drag Race" est au fil des années devenu un honneur qui a su attirer quelques superstars de la pop américaine : Miley Cyrus, Christina Aguilera, Ariana Grande ou encore Lady Gaga se sont notamment prêtées au jeu. Mais en mai 2019, pour l'épisode final de la onzième saison de l'émission, l'invitée d'honneur était cette fois-ci française puisqu'il ne s'agissait ni plus ni moins que de Chris, alias Christine & the Queens.
L'interprète de "Saint Claude" était en effet l'invitée de RuPaul, un fan de cette dernière, pour interpréter "Sissy that Walk", un titre de l'album "Born Naked" de RuPaul (2014). Devenu un titre iconique des fans de "RPDR", "Sissy that Walk" accompagne ici l'un des défilés des finalistes de l'édition 2019 de l'émission, qui sacrera vainqueur Yvie Oddly. Plus de 700 000 téléspectateurs sont ce soir-là devant la chaîne VH1 pour ce qui sera l'une des plus grosses audiences de l'histoire de la "Drag Race".
Une conviction personnelle
Il faut dire que voir Chris prendre part à l'émission emblématique de la culture drag n'a rien d'un hasard, tant le parcours de l'artiste est intimement lié à cette culture, qui transpire jusque dans son nom de scène. Car les "Queens" en question dans l'un de ses pseudonymes, ce sont celles de Madame Jojo's, un cabaret de drag queens londonien dans lequel elle a logé pendant quelques mois suite à une rupture sentimentale et un épisode dépressif.
Elle découvre à l'époque le monde du drag et notamment The Fabulous Russella, une populaire drag queen britannique qui va devenir l'un de ses modèles. Cette rencontre sera un déclic dans la vie de la jeune Nantaise d'origine, qui apprend dès lors à s'émanciper des normes de genre : se définissant comme pansexuelle, elle se définit également comme non-binaire et genderqueer, une identité refusant la seule distinction sociale entre hommes et femmes. Devenue depuis ses débuts une idole de la communauté LGBT, elle s'est même glissée le temps d'une séquence de relooking dans le costume d'une drag queen pour un média américain.