Un titre qui échappe aux oubliettes
"Je l'aime à mourir" est non seulement l'un des plus grands classiques de la carrière de Francis Cabrel, mais c'est également la chanson qui l'a révélé au grand public en 1979. À l'époque, le chanteur gascon n'a pas encore la trentaine, et reste sur l'échec d'un premier album, "Les murs de poussière", passé inaperçu (car la chanson éponyme sera redécouverte a posteriori, tout comme "Petite Marie"). Le deuxième, "Les chemins de traverse", ne suscite pas non plus à sa sortie un intérêt colossal, jusqu'à ce qu'un morceau, "Je l'aime à mourir", commence à faire son chemin à la radio, puis à séduire le grand public. Le succès est pourtant le fruit d'un heureux hasard, car le morceau est le dernier à intégrer la tracklist de l'album, et aurait pu ne jamais exister. En 1984, Cabrel était revenu sur les circonstances ayant conduit à cette heureuse naissance, auprès du magazine Guitares et Claviers : ""Je l'aime à mourir" a été écrite en une heure. Un pote est venu me voir dans l'après-midi et m'a montré un picking à l'envers sur la guitare, il est parti, et vers 9 heures, je me suis amusé à bosser cette technique ; à 10 heures, j'avais fini la chanson. À ce moment-là, l'album était déjà terminé, j'avais les dix titres, mais, comme il restait trois jours de studio, on a rajouté la chanson in extremis".
Un titre à l'opposé de la méthode Cabrel
Aujourd'hui encore, "Je l'aime à mourir" ressemble autant à une bénédiction qu'à une anomalie dans la discographie de Francis Cabrel. La précipitation dans laquelle le morceau est né est en effet à rebours total de la méthode d'écriture du chanteur, qui a toujours clamé son goût pour l'écriture sur le temps long, parfois pour simplement trouver un ou deux mots par heure. Inspiré par ses idoles de jeunesse que sont Bob Dylan et Leonard Cohen, Cabrel est un adepte des longues sessions introspectives pendant l'écriture de ses chansons, qui tranchent avec la relative simplicité mélodique de "Je l'aime à mourir", construite sur une ligne mélodique très simple et répétée en boucle. Le chanteur ne savourera d'ailleurs pas pleinement le succès de la chanson qui crée chez lui une forme d'incompréhension. Lui qui s'imaginait grand importateur du style country en France devient aux yeux du public une sorte de poète romantique rural.
Le plus grand succès d'une carrière
Il faut dire que le triomphe de "Je l'aime à mourir" est stratosphérique. Le titre s'écoule l'année de sa sortie à plus de 700 000 exemplaires, et permet à l'album "Les chemins de traverse" de dépasser les 600 000 ventes. Si "Samedi soir sur la Terre" parviendra à battre le score du second, avec ses trois millions de disques vendus, le single reste encore aujourd'hui le plus gros succès de la carrière de Cabrel. Son succès est tel que le titre traversera les Pyrénées en 1998, dans une version en espagnol pour le compte de la compilation "Algo mas de amor". "Lo quiero a morir" connaîtra par ailleurs une seconde vie, à l'international cette fois-ci, en 2011. Tombée amoureuse de la chanson comme tant d'autres, Shakira décide d'enregistrer sa propre version du titre dans les deux langues pour sa tournée "The Sun Comes Out World Tour". Une version qui sera certifiée disque d'or en France, et dont le clip atteint les 40 millions de vues sur YouTube.